Le but de la psychomotricité, dans la prise en charge du syndrome de Rett, est d’améliorer la qualité de vie des personnes polyhandicapées. Cela passe par une étroite relation parents/professionnels. Il est impensable qu’une éducation psychomotrice se fasse sans la participation active des parents, qui non seulement assument leur rôle de parents, mais qui dans le même temps n’ont aucune possibilité d’accompagner le handicap de leur enfant. Qui lui apprend à marcher ? Qui se « débrouille » pour aménager ses repas, ses siestes, ses sorties ?

Nous reprendrons ici les principes de bases du développement de l’enfant avec l’apport du développement sensorimoteur de l’enfant tel que le décrit André Bullinger pour comprendre comment mieux accompagner les personnes atteintes du syndrome de Rett.

Les personnes atteintes du syndrome de Rett sont considérées comme des personnes polyhandicapées dont la sévérité est variable : elles peuvent ou non acquérir la marche. Toutefois, les particularités de cette affection et son évolution peuvent nous amener vers des objectifs spécifiques. Les enfants atteints du syndrome de Rett ont des manifestations émotionnelles très marquées :

  • hyperventilation ;

  • regards intenses ;

  • postures marquées ;

  • cris ;

  • stéréotypies.

Il est intéressant en psychomotricité de reprendre toutes ces manifestations en prenant en considération le soubassement sensorimoteur de celles-ci afin d’affiner la compréhension du fonctionnement de ces filles, pour le développer autant que possible ou le soutenir, pour aider ces enfants à entrer en relation avec le monde environnant.

Suivant l’âge de la prise en charge, les particularités et les possibilités tant physiques que relationnelles propres à chacune des filles, l’objectif du travail en psychomotricité visera la prise de conscience du corps (stimulation tactile, toucher thérapeutique, travail devant le miroir, prise de conscience de la respiration…), l’exploration des possibilités gestuelles et motrices dans des activités (poney, piscine…). Ce travail est toujours accompagné de verbalisation rendant compte de ce qu’on perçoit, ce qu’on comprend de l’enfant.

De plus, du fait de l’aspect évolutif de la maladie, il est essentiel d’aider ces filles à maintenir leurs acquis en les amenant à développer l’initiative du geste afin de les conduire vers une action volontaire sur l’environnement guidée par leurs propres désirs.

Ainsi notre objectif est de leur permettre :

  • de découvrir leur corps ;

  • de découvrir le plaisir d’agir ;

  • de découvrir les possibilités d’utiliser leur corps pour exprimer leurs émotions ;

  • de manifester leurs désirs ;

  • d’agir sur le monde environnant ;

  • de leur permettre des manipulations.

Le geste devra toujours être source de plaisir et valorisant.

Il est important de souligner ici quelques rappels concernant le développement d’un individu. Nous nous basons alors sur le développement sensorimoteur et psychomoteur.

Le système nerveux répond à une nécessité de coordination entre les différentes parties du corps, dans la réalisation d’un mouvement, suite à une envie de faire ou en réponse à un stimulus (réflexe). À la naissance, et jusqu’à 3 mois, la motricité sera involontaire, principalement régie par une activité réflexe. Cette dernière est représentée par les réflexes archaïques : la succion et la déglutition, par exemple, permettent l’activité alimentaire. D’autres réflexes, comme celui de la marche automatique et du grasping (fermeture des doigts de la main) préfigurent les futures activités motrices. À partir de 3 mois, avec les progrès dans le développement postural, la fonction motrice va devenir sous contrôle volontaire par le biais de trois systèmes :

  • la motricité volontaire (système pyramidal) ;

  • la motricité automatique (système extrapyramidal) ;

  • la régulation harmonieuse interne du mouvement (système cérébelleux).

Toute cette organisation va agir sur la charpente du mouvement : le tonus musculaire. Il est l’expression de l’état de tension musculaire permanent, actif, involontaire, variable selon l’activité. Il est à la base du mouvement et sous-tend le geste. À la différence du mouvement, le geste est porteur d’une signification communicative (tendre la main pour dire bonjour).

L’évolution du tonus est liée à la maturation neurologique. Il répond en particulier à deux lois de développement :

  • loi céphalocaudale : le contrôle moteur et postural se développe du haut vers le bas du corps (le maintien de la tête est présent avant la position assise) ;

  • loi proximo-distale et latérale : le contrôle des segments de membre évolue de l’axe vertébral vers la périphérie. (L’épaule est d’abord utilisée, puis le bras, l’avant-bras et enfin la main.)

  • Enfin, ces deux lois sont régies par la loi de différenciation : la motricité globale s’affine et se différencie en activités de plus en plus localisées, fines et adaptées

Deux exemples pour illustrer ces deux lois

Il convient de respecter cette chronologie lorsque nous proposons des activités aux filles atteintes du syndrome de Rett. Cela implique un choix de jeux visant des exercices qui maintiennent les stades acquis et contribuent à passer aux stades suivants.

Ainsi, même s’il est essentiel d’avoir ces repères chronologiques, en nous basant sur les éléments du développement sensorimoteur de l’enfant, nous allons nous employer, lors des bilans et dans nos prises en charge, à essayer de comprendre et à étoffer la dynamique propre à chacune des enfants rencontrées. Comment ces acquisitions s’appuient les unes sur les autres ? Quels vont être les soutiens et les mises en forme corporelles qui vont permettre à ces filles d’arrêter, un moment, leurs mouvements de mains pour avoir des manipulations plus dirigées, de réguler leur respiration ? Comment allons-nous favoriser les changements de posture, les déplacements ?

Plus qu’une évaluation stricto-sensu du tonus, qui dépend en grande partie de la personne qui l’évalue, nous allons nous intéresser aux modes de régulation tonique nécessaires à la mise en place de gestes adaptés. Ces gestes sont sous tendus par une activité psychique : elle est indispensable pour la compréhension de la situation en cours et nécessaire pour enrichir les mouvements.

Les modes de régulation tonique (A. Bullinger)

Pour comprendre la dynamique de l’enfant, il faut repérer les modes de régulation tonique qu’elle utilise. Les modes de régulation toniques auxquels nous avons recours dans le développement sont de quatre ordres. Ils font appel, sur le plan neurologique, à des structures archaïques pour les deux premiers et à des structures dites plus récentes pour les deux autres.

  • Le premier mode de régulation tonique est une régulation par les niveaux de vigilance (Prechtl, 1974). C’est une régulation par tout ou rien, comme chez le bébé. Celle-ci peut s’exprimer, soit par une attitude de retrait dans le sommeil ou dans une attitude souvent interprétée comme une « fatigue » qui cède dès que l’intérêt revient, soit par les pleurs. C’est probablement un des premiers matériaux de l’activité psychique et souvent le seul moyen à disposition d’une personne polyhandicapée ou sans possibilité de langage verbal. Il est donc essentiel de le repérer pour en souligner l’importance expressive aux personnes qui s’occupent de ces filles.

  • Le deuxième mode de régulation est une régulation de l’état tonique par la variation du fl ux sensoriel. L’état tonique existe pendant la sollicitation sensorielle et disparaît peu à peu quand la sensation n’est plus là. La sensation procurée existe donc dans un temps et un moment donné. Une non maitrise d’un fl ux sensoriel entraine une difficulté pour traiter des régularités produites par les mouvements. Cela se traduit par une fragilité de l’image corporelle, une instabilité et une irritabilité émotionnelle.

  • Le troisième mode de régulation est une régulation externe à l’enfant. Elle est donnée par le milieu humain, en premier lieu par le dialogue tonique et la prise de sens donnée par les paroles. Cela permet une régulation immédiate du tonus et de l’émotion par le partage et l’accordage entre l’enfant et la personne qui s’en occupe.

  • Le quatrième mode de régulation est spécifié par les capacités de représentations de l’enfant (Wallon, 1933). Ce mode de régulation n’est plus sensorimoteur mais permet d’anticiper les situations, grâce à la mémorisation, et assure ainsi une meilleure régulation de l’émotion et du tonus, nécessaire pour préparer les actions en cours puis les accomplir.

Au quotidien, et dans nos prises en charge, il est nécessaire d’accompagner les filles atteintes du syndrome de Rett dans la découverte des différents flux sensoriels auxquels elles sont soumises pour pouvoir acquérir des capacités de représentation et de régulation de l’émotion. Cela leur permet d’enrichir leurs découvertes et leurs capacités opératoires (Bullinger, 1999. Equilibre sensoritonique).

Les flux sensoriels

Notre organisme se trouve soumis aux différents flux sensoriels qui nous entourent (tactile, auditif, gravitaire, olfactif et gustatif, visuel). Un flux sensoriel est une sollicitation sensorielle fixe et orientée. Il va irriter les différents capteurs sensoriels que nous possédons et entraîner une chaîne de réponses spécifiques de notre organisme.

L’alerte : elle permet un recrutement tonique. L’orientation va se faire grâce à la mobilisation tonique et la mise en forme corporelle. L’évaluation de la distance permet la dernière réponse qui est l’exploration ou la manipulation.

Le flux sensoriel est mieux géré et compris si la personne peut être active : toucher, bouger, s’en approcher, s’en éloigner, s’en détourner. Ainsi, les flux sensoriels vont façonner et mettre en forme l’organisme pour lui permettre de déployer des actions finalisées sur son milieu. Nous les détaillerons un peu plus loin. Les capteurs qui détectent les flux sensoriels sont principalement situés au niveau de notre tête. Mais, le flux tactile concerne toute notre enveloppe corporelle. Le flux gravitaire, lui, est perçu par notre organisme au niveau des points d’appui donnés par les pressions exercées par notre corps (station assise, couchée…) et par l’oreille interne qui nous renseigne sur la position de notre tête et de notre corps dans l’espace (mouvements, déplacements, changements de direction).

Althéa et sa maman jouent ensemble
Althéa et sa maman

L’organisation sensorielle

La peau participe pleinement à l’élaboration du dialogue tonique. De tous les organes des sens, elle est non seulement le plus important en taille, mais le seul qui soit parfaitement opérationnel à la naissance. L’enfant réagit au toucher et les récepteurs qui lui permettent de différencier le chaud, le froid, la douceur ou la fermeté d’un contact et la douleur sont en place. Il est capable de réagir de façon positive ou négative par le biais de son état tonique ; non seulement il exprime un bien-être ou un malaise, mais analyse ses états de tension tonique avec leurs différentes origines. Les défenses tactiles (réactions négatives à un toucher) sont à travailler avec différents matériaux dans les prises en charge mais aussi au quotidien. Le toucher ferme du plat de la main est souvent mieux supporté par l’enfant qu’un toucher du bout des doigts. Des expériences nouvelles au niveau des touchers aussi bien au niveau des bras et des mains qu’au niveau des jambes et des pieds, trop souvent négligés et n’étant pas un lieu de connaissance pour les filles, peuvent être favorisées. Les jeux assis, délestant le poids du corps, et favorisant les mouvements des chevilles et des pieds sur des textures différentes vont être des situations permettant de découvrir et de développer le pied explorateur nécessaire à la marche et contribuent à préserver l’intégrité du pied au niveau orthopédique.

La vision focale n’est mature qu’à partir de 3 mois. Avant, la netteté n’est possible que de près. Mais la vision périphérique, analyseur du flux sensoriel, est mature à la naissance. Elle détecte les mouvements du spectacle autour de nous, les mouvements de notre corps. Elle est sensible aux faibles luminosités. Elle permet de situer nos membres et notre corps dans l’espace.

C’est vers 3 mois, grâce à la coordination entre la vision focale et la vision périphérique, que la poursuite visuelle lente va pouvoir s’engager. Cette capacité fluctue avec les appuis offerts. Il est important de souligner ici que dans le cas du syndrome de Rett, la plupart des filles utilisent la vision périphérique. Les mouvements et les objets présentés sur le côté sont perçus plus facilement que de face. Il est donc essentiel de leur offrir un bon arrière fond, par les bras du porteur pour les plus jeunes. L’attention portée à la situation dans l’espace des filles, en veillant par exemple à ne pas les situer au milieu d’une pièce, à ne pas laisser d’ouverture (portes ouvertes ou fermées) ou de vide derrière elles est essentiel. La mobilité de leurs yeux va augmenter et donner toute la richesse de leurs expressivités.

L’audition s’affine également au cours des premiers mois de la vie. Les bruits sourds et graves sont perçus plus facilement. C’est la conséquence du séjour de l’enfant dans le ventre de sa mère où les sons qui lui parviennent sont atténués par la paroi abdominale. Il est important de repérer si les bruits sont perçus et localisés aussi bien dans l’espace proche ou lointain. Il est nécessaire de leur laisser le temps de s’orienter vers la source sonore. Ici intervient la notion de temps chez les filles syndrome de Rett. En effet, les bruits et sons de la vie de tous les jours contribuent à organiser le déroulement de la journée. Sous des formes simples et aussi accessibles à tout enfant : explorer, baliser l’espace corporel, interpersonnel, la pièce de vie, l’extérieur, la voiture, la maison, les rapports entre les objets, les meubles, les installations... enseignent à l’enfant comment se situer, se mouvoir et se repérer dans le temps.

Sensations vestibulaires au niveau de l’oreille interne : la gravité et l’oreille interne vont permettre à l’enfant d’orienter son corps face aux forces de la pesanteur, de comprendre et supporter les changements de position ainsi que les changements de direction lors des déplacements. C’est la coordination entre les pressions détectées par notre organisme au niveau de la sensibilité profonde, les sensations tactiles en particulier et les sensations vestibulaires qui vont nous permettre de comprendre la construction de la verticale. Les mains et les avant-bras vont prendre appui sur la surface de contact et les mouvements vont s’orienter. La stabilité posturale va pouvoir s’exercer si les mises en forme corporelles sont adaptées. Le système visuel va alors s’engager dans une exploration du spectacle ambiant et la tête va s’orienter vers une source sonore : la situation est optimale et cohérente quand il y a coïncidence entre ce que l’enfant voit et entend. C’est le cas lorsque l’enfant regarde sa mère ou son père qui lui parle, bien stabilisée dans leurs bras. Les surfaces dures, comme un plancher renvoyant une vibration et un effet qui donnent le sens de la verticale, sont plus organisant que des surfaces molles qui absorbent les mouvements et ne donnent pas d’appuis fi ables lors des changements de positions. Ces surfaces dures seront à privilégier ainsi que tous les jeux vestibulaires. (Bullinger, 2012).

Les goûts sont présents à la naissance : salé, sucré, acide, neutre et umami. Ce sens s’affine avec l’expérience gustative que l’on proposera en diversifiant petit à petit l’alimentation.

Soulignons ici l’importance de la bouche dans les expériences du tout petit. C’est l’organe privilégié de la notion de plaisir puisque c’est par cette voie qu’est administrée une des principales satisfactions de bébé : la nourriture. L’enfant associe très vite le malaise déterminé par la faim au plaisir de satiété procuré par l’apport de nourriture.

L’olfaction se développe également au fi l des expériences. Cependant, il faut noter l’attachement que l’enfant peut porter aux odeurs de ses parents. Un vêtement porté par la mère ou le père calme souvent un enfant angoissé par une séparation. De même, le fameux doudou qui n’a plus la même action apaisante lorsqu’il est lavé… C’est un puissant moyen contenant. Enfin, les odeurs propres aux différents moments de la journée (les sons également) participent à la structuration du temps.

Pour comprendre les différentes situations, le premier moyen de communication à notre disposition est le dialogue tonique.

Le dialogue tonique

À la naissance, le tout petit ne peut s’exprimer verbalement. C’est par le biais de son tonus musculaire qu’il va apprendre à communiquer de façon non-verbale. Le regard, les sourires sont sous-tendus par une activité tonique. Très vite, ils vont interagir avec ceux de l’adulte. Ainsi, l’enfant sera capable de ressentir le degré de contraction tonique de l’adulte qui le porte ou s’occupe de lui et exprimera sa satisfaction ou ses craintes par une détente ou des pleurs. La mise en mot immédiate sur les émotions et sur la situation contribue à une meilleure compréhension de celles-ci avec des anticipations possibles. Il est donc nécessaire de leur donner le temps de faire.

De l’organisme au corps

Dans une perspective de psychologie du développement sensorimoteur c’est la façon dont un individu élabore sur le plan représentatif son organisme pour en faire un corps. Notion assez abstraite, cette fonction est nécessaire à l’élaboration et l’utilisation de la motricité. Le schéma corporel permet la possibilité de contrôler son corps dans l’espace et dans le temps : dans l’espace pour se déplacer, réaliser un mouvement ou un geste ; dans le temps parce qu’il faut organiser son corps dans une succession d’actions en respectant une chronologie précise.

Les structures qui soutiennent le schéma corporel sont les suivantes : tout d’abord les récepteurs présents dans les tendons, les corps des muscles, les articulations. Ils donnent des informations sur la position et le déplacement des segments. Ces informations sont contrôlées par le cervelet qui de façon inconsciente corrige le mouvement de façon à le rendre harmonieux et fluide. Une atteinte neurologique du cervelet donne des mouvements tremblés et saccadés lors de leur réalisation. D’autres structures, les noyaux gris centraux, situés au centre du cerveau, ont la même fonction. Une atteinte de ces structures donne des tremblements au repos.

Le cerveau est le point de départ du mouvement. Il existe une représentation des différentes parties du corps à sa surface. Le schéma corporel n’est pas organisé à la naissance, c’est l’expérience motrice et les coordinations sensorimotrices qui le construisent. Les mouvements involontaires du nouveau-né mettent en place les connexions nerveuses qui s’affineront au fur et à mesure de la maturation, mais cela n’est pas suffisant.

D’un organisme d’abord perçu et ressentit, il devient ensuite, grâce aux échanges avec le milieu, un corps connu et reconnu. Pour cela, l’enfant doit arriver à faire des coordinations sensorimotrices qui vont lui permettre de se situer dans l’espace. L’espace n’est pas une donnée en soi, il se construit en premier lieu à partir des différents espaces corporels que l’enfant va expérimenter. « Quand l’œil parle à la main leur langage c’est l’espace » (A. Bullinger). Très en lien avec le développement postural, les expériences sensorimotrices et les progrès du redressement, l’enfant va pouvoir investir différents espaces corporels : l’espace utérin, l’espace de la pesanteur, l’espace oral, l’espace du buste, l’espace du torse et l’espace du corps. C’est en étant attentif à la façon dont ces différents espaces vont s’emboiter les uns dans les autres que nous allons pourvoir comprendre la dynamique de l’enfant et essayer de l’accompagner au mieux dans la compréhension de son corps.

La connaissance des mots désignant les différentes parties de son corps est partie intégrante du schéma corporel. Ainsi, même s’il ne parle pas, verbaliser l’action entreprise l’aide à son développement et à la compréhension de la situation. Par exemple, lors du lavage et du séchage, en lui indiquant la partie du corps que l’on va ou que l’on touche.

Dans le développement sensorimoteur, la proprioception n’est pas une donnée en soi. C’est une élaboration, elle se construit au cours des expériences auxquelles nous sommes confrontées. Elle permet de situer notre corps dans l’espace : la proprioception est la coordination entre les signaux issus de la sensibilité profonde et ceux issus de la variation des flux sensoriels (visuels et tactiles entre autres) (A. Bullinger). La situation est mieux comprise et supportée si l’enfant est actif devant la sollicitation sensorielle et ne la subit pas. Pour cela il faut permettre le plus possible à l’enfant de participer, même a minima, à la situation en étant attentif à son rythme et à sa capacité de répondre. Il est important de les alerter, de leur laisser le temps nécessaire pour des anticipations de l’action en cours

Pour aider les enfants, nous allons être aussi attentifs au contrôle postural assuré par les mises en formes corporelles adaptées à la situation.

Inna joue avec avec son frère et sa maman
Inna avec son frère et sa maman

Le contrôle postural

Ce contrôle permet à l’enfant de réguler et de canaliser l’énergie tonique afin de faire aboutir ses gestes ou de prolonger une action, une position du corps.

Il faut donc, chaque fois que l’on démarre une activité, vérifier que l’équilibre du corps est correctement assuré. Cela, aussi bien debout qu’assis. En effet, une activité de préhension ne pourra s’opérer correctement que si la tête et le tronc sont bien maintenus.

Pour favoriser le passage d’une position à l’autre :

  • allongé sur le dos vers allongé sur le ventre ;

  • d’allongé vers l’assis ;

  • de l’assis vers le debout.

Les mises en formes corporelles vont être essentielles.

Mises en forme corporelles

À la naissance, l’enfant dispose de postures de bases, dites creusets posturaux, qui sont des points d’équilibre à partir duquel il va pouvoir organiser sa vie sensorielle.

Ces mises en formes posturales, déterminent des espaces corporels séparés : gauche, droit, médian. On distingue des espaces gauche et droit qui s’appuient sur des postures de type « escrimeur » ou ATNP (Assymetric Tonick Neck Posture de Caeser) postures d’ouverture sur le milieu, et une posture symétrique, le plus souvent en fl exion, qui privilégie l’espace oral et centre l’enfant sur lui-même.

Les postures de types ATNP permettent une répartition tonique différente entre les deux côtés du corps. Le côté ou la tête est tournée est plus tonique, l’autre plus détendu et l’appui au niveau de la fesse doit se faire du côté opposé où la tête est tournée. Cela permet aussi à l’enfant d’assurer des liens entre l’oeil et la main du côté face. Les espaces qui sont relatifs à ces postures restent disjoints tant que celles-ci ne sont pas coordonnées. La coordination des espaces droit et gauche va se faire via l’espace oral quand chez le bébé les objets passent en bouche. Puis les torsions du buste peuvent s’engager si l’enfant a pu équilibrer l’avant et l’arrière de son corps. Si cette coordination entre flexion/extension ne peut s’opérer, on observe deux effets principaux :

  • Le premier concerne la zone orale qui va être fortement sollicitée par des salivations, des mouvements de langue ou de lèvres, et la position médiane qui va être maintenue par un tonus dit « pneumatique » (A. Bullinger) : l’enfant retient sa respiration pour stabiliser sa posture.

  • Le second effet concerne les déséquilibres entre la droite et la gauche du corps. Nous voyons bien les effets accentuant que cela peut avoir au niveau des particularités développées dans les domaines respiratoire et orthopédique (scoliose) des filles atteintes du syndrome de Rett. Pour éviter cela et leur permettre de déployer toutes leurs potentialités, nous allons les accompagner pour leur ouvrir des fenêtres de découvertes en étant attentif aux mises en forme corporelle, dans nos prises en charge dans la vie au quotidien, et aux appuis donnés pour leur permettre d’agir.

  • Les situations qui favorisent l’enroulement et les regroupements : les positions allongées sur le dos, tête et bassin soutenus, lors des changes et des jeux, permettent la connaissance de l’avant du corps. Le corps est perçu en entier. Les bascules du bassin facilitent les changements de position.

  • Le dos de l’enfant appuyé contre le porteur ou un support, les jeux présentés sur les côtés permettent les postures de types asymétriques toniques (ATNP). Cela favorise la dissociation des mains et des manipulations.

  • Les appuis sur l’avant du corps, aident les filles à lâcher les « mouvements typiques de lavage des mains ».

  • Les déplacements sur les objets porteurs les aident à trouver de bons appuis au niveau du bassin pour préparer la marche. Voici quelques exemples non exhaustifs de situations qu’il faudra penser en fonction de l’enfant dont on s’occupe et de son niveau de développement. Mais au quotidien, il convient d’avoir à l’esprit ces éléments, appui sur l’avant du corps, positions asymétriques, enroulement, afi n de maintenir et d’améliorer les capacités des enfants syndrome de Rett. Du point de vue professionnel strict, le travail est le même avec évidemment des moyens différents. Une salle équipée pour la stimulation sensorielle, la possibilité d’utiliser des médiateurs éducatifs que nous allons rapidement détailler.

La musicothérapie

Elle utilise les éléments constitutifs de la musique : rythmes, sonorités, contrastes, vibro acoustique… Il s’agit de favoriser une mise en acte et des ressentis différents plutôt qu’une mise en parole. Elle agit surtout sur le versant non-verbal de la communication. La musicothérapie tente de faire revivre le cheminement de l’accès au langage : du babillage aux repérages nécessaires à l’élaboration de la pensée.

La balnéothérapie

Favoriser le mouvement et la posture en limitant les effets de la pesanteur, postulat de base de cette discipline. Bien sûr, elle ne se limite pas à cela. Elle utilise également le versant psychothérapeutique de l’eau.

L’équithérapie

Le contact avec un animal est important pour un enfant ou un adulte. Cette discipline utilise les relations et la communication que peuvent mettre en place un animal et un humain. De plus, tout un travail sur le sensoriel, sur la posture et son maintien sont effectués.

Pour conclure, rappelons que la prise en charge en psychomotricité peut s’effectuer de différentes façons :

  • en individuel, avec et sans appareillage ;

  • avec et sans les parents ;

  • en groupe avec d’autres enfants (cf chapitre Aspects éducatifs).

Évelyne CAMARET-NINU et Philippe KOSTKA, psychomotriciens (2016)

Liens utiles :

Vidéo d'Evelyne Camaret sur la psychomotricité Vidéo de Philippe Kostka sur la psychomotricité Vidéo de Philippe Kostka et Evelyne Camaret

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